ÉNERGIE-HABITAT-MOBILITÉ
Quelles recherches sur l'énergie, l'habitat et la mobilité pour demain ?
B.16. Sortir le train de la voie de garage
- Durant plusieurs décennies certains pays ont orienté les priorités ferroviaires vers la construction de Lignes à Grande Vitesse (LGV). D’autres pays comme la Suisse et l’Autriche ont préféré les “trains lents”, avec une vitesse maximale autour de 230 km/h afin de favoriser un maillage dense (un train rapide s’arrête peu). Une telle optique s’est montrée favorable à la réouverture des voies ferrées fermées, à la régénération des “petites lignes”, et au déploiement des trains de nuit. Une évaluation sous forme de convention citoyenne permettra de mieux dessiner les besoins à satisfaire, les vitesses souhaitables et les liaisons à garantir.
- Évaluer l’impact complet des grands projets d’infrastructure, en incluant également l’énergie grise de construction et les pertes en artificialisation des sols. Certains pays comme l’Espagne et la France ont eu une certaine tendance à abandonner leur réseau ferré existant au profit de la construction de nouvelles infrastructures à Grande Vitesse. Une telle évaluation pourrait contribuer à mieux financer la régénération, la modernisation et les besoins de fonctionnement des réseaux existants.
- Quel est le potentiel et la pertinence sociale, écologique et économique d'un redéploiement du réseau ferré avec un maillage territorial serré et des trains cadencés à l’heure ou demi-heure et des trains de nuit pour connecter l'Europe sans besoin de déplacements aériens ? Et quelles conditions et quels investissements seraient nécessaires pour rendre ce changement réalisable et attractif ? (par exemple avec des prix attractifs « le train au prix du covoiturage »). Quelle a été l’histoire et le rôle des lobby industriels dans le sous-investissement et le démantèlement des mobilités vertueuses : le vélo, les tramways, des petites lignes ferroviaires et des trains de nuit ?
- Quel pourcentage de la population serait d’accord pour changer de comportement, afin d’emprunter des trains de nuit plutôt que l’avion ? Le vélo/transports en commun/TER/RER régional plutôt que la voiture?
Longues distances voyageurs et fret : organiser la compétition entre les mobilités en incluant les enjeux climatiques
- Comment rendre les mobilités écologiques compétitives en prix sur le marché des longue distance ? Sur le créneau 800-1500 km la mobilité la plus polluante – l’avion – écrase les prix face aux mobilités terrestres (et maritimes). L’avion est souvent moins cher que le bus, le covoiturage, le ferry ou le train. Les transports polluants ne payent pas le coût complet des externalités négatives qu’ils produisent (mortalité par pollution de l’air et accidents de la route, bruit, congestion, occupation de l’espace, consommation d’énergie et de ressources non renouvelables, etc). Des nombreuses actions sont possibles comme la fiscalité pollueur-payeur sur les mobilités que l’UE aborde sans succès de manière réitérée depuis 1995 ; la taxe sur les billets d’avion de 13€ en Allemagne ; ou le prix plancher de 40€ sur les billets d’avion en Autriche. Une étude comparative pourrait aider à construire une politique commune pour l’UE. La fiscalité permettra de financer des mobilités alternatives, comme le train de nuit, qui est la seule mobilité confortable à pouvoir couvrir ces distances de 800 à 1500 km.
- Quelles stratégies pour mettre en place des quotas de consommation, par exemple sur les billets d’avion ? Les voyageurs fréquents (frequent flyers) génèrent un fort impact, ce qui pourrait justifier d’envisager une fiscalité spécifique voire un quota de vols par personne#sdfootnote1sym" target="_blank">1.
- Comment encadrer la publicité sur les mobilités polluantes (loi Evin sur les mobilités)#sdfootnote2sym" target="_blank">2 ?
- Quelle est la faisabilité, quels seraient les avantages et inconvénients de ré-allouer des voies d'autoroutes au transport ferré ? Sachant que les autoroutes acceptent des pentes et les courbes plus importantes que le ferroviaire, il s’agit d’étudier sous quelles conditions de tels projets pourraient effectivement être réalisés et avec quel potentiel de report modal et de dé-artificialisation des sols.
- Quel potentiel pour le transport maritime à faible impact ? Le fret maritime est actuellement très polluant en particules fines à cause des carburants lourds employés. En revanche, cette mobilité est efficace énergétiquement, ce qui permet même une propulsion éolienne directe : des initiatives renaissent ainsi aujourd’hui pour le fret maritime à la voile#sdfootnote3sym" target="_blank">3. D’autres motorisations et optimisations de gestion par exemple sous la forme des “cargos de nuit fret + voyageurs” seraient également à étudier, ce qui permettrait de réduire le recours à l’aviation sur les distances jusqu’à 800 km - réalisables en une nuit - ainsi que sur de plus longues distances.
- Quel potentiel et quel impact du transport fluvial ? Le fret fluvial et le cabotage côtier peuvent constituer une solution à empreinte carbone et énergétique réduite. Les gabarits restreints de nombreux canaux historiques ont amené à leur abandon pour le fret à l’arrivée du rail au 19ème siècle. Quelle part du réseau de canaux existants - et quels gabarits - pourraient être utiles dans une optique de transition dans les transports, représentant quelle quantité de fret ? Sous quelles conditions ? Quels sont les impacts de mise à grand gabarit ? Des grands projets comme le Canal Seine Nord ont pu prétendre pouvoir atteindre une efficacité énergétique meilleure que le ferroviaire. Comparer le ferroviaire et le fluvial en termes d’impacts permettra d’éclairer les choix.
- Étudier des scénario ambitieux pour les mobilités à l’horizon 2035, avec par exemple avec la réduction d’un facteur 10 de la mobilité longue distance (au-delà de 800 km), de manière à ce que le trafic aérien puisse être capté par une augmentation d’un facteur 10 des déplacements en train de nuit (incluant des trajets Europe-Asie jusqu’à 15 000 km) et en navigation fret-voyageurs transcontinentale. Sur les courtes distances, une relocalisation et une augmentation forte des mobilités actives et du ferroviaire de proximité, pourrait permettre une réduction d’un facteur 10 de l’usage de l’automobile. Quel serait le bilan énergétique, climatique et social d’un tel futur optimisé sous l’angle organisationnel ? Approfondir ces scénarios est nécessaire pour guider l’action au cas où les sauts technologiques espérés ne sont pas au rendez-vous.
- Quelles sont les possibilités et quels seraient les impacts socio-économiques possibles d'un report significatif du transport routier et aérien vers le rail ? Comment permettre alors la reconversion professionnelle des personnes en activité dans le transport routier et aérien ? Suite à la crise Covid, une reconversion d’une partie du personnel aérien vers le ferroviaire est à l’ordre du jour par exemple en Suisse. Elle est à étudier pour permettre des passerelles de transition des métiers.
#sdfootnote1anc" target="_blank">1 Introduce frequent flyer levy to fight emissions, government told, BBC, 24 sept. 2019. https://www.bbc.com/news/business-49808258; Yves Cochet, Une carte carbone plutôt qu’une taxe carbone, Le Monde, 11 fév. 2019. https://www.institutmomentum.org/une-carte-carbone-plutot-quune-taxe-carbone/
#sdfootnote2anc" target="_blank">2 Bras-de-fer autour de la publicité sur les produits polluants, Le Télégramme, 5 oct. 2020. https://www.letelegramme.fr/economie/bras-de-fer-autour-de-la-publicite-sur-les-produits-polluants-05-10-2020-12631886.php
#sdfootnote3anc" target="_blank">3 https://www.towt.eu/ ; https://www.wingsoftheocean.com/fret-voile/
Signaler un problème
Ce contenu est-il inapproprié ?
Partager: